Site internet des destinations : et si on commençait à écrire des histoires ?
Marketing Destination OfficesDuTourisme Facebook GoogleLongtemps, le site de l’office de tourisme (OT) a été la porte d’entrée principale pour rechercher les informations touristiques d’un territoire. Le développement des fonctionnalités Google My Business ou Facebook City Guide a passablement redistribué les cartes. Face à ces géants du Web, que reste-t-il aujourd’hui de la valeur ajoutée du site internet de l’OT ? L’OT doit-il continuer de maintenir un système d’information touristique chronophage pour alimenter un site internet dont la fréquentation est en baisse ? Ne doit-il pas repenser ses missions et la valeur ajoutée de son site ? La question est posée !
Pour la seconde année consécutive, Tourobs s’est rendu à Pau (Pyrénées) afin d’assister aux 13e Rencontres Nationales du e-Tourisme #ET13. Parmi les quelques 900 participants : des offices de tourisme, des comités régionaux et départementaux du tourisme, des blogueurs, des fournisseurs de services technologiques, des sociétés comme Voyages sncf.com, Futuroscope ou même Airbnb France.
Crédit photos ©Maria Alberola
Bien que les sujets aient été plus riches les uns que les autres, nous avons choisi de nous intéresser à deux discussions autour des sites internet des destinations et du devenir des systèmes d’informations touristiques (SIT) (cf bas de page pour voir les vidéos)*.
Posons le sujet….
« Les OT passent trop de temps à gérer et actualiser des SIT, cannibalisés par Google et Facebook, pour alimenter un site internet qui est de moins en moins consulté. Alors que fait-on ? On ferme le site internet de l’OT ? ». Grossie mais néanmoins réelle, voici la problématique soulevée.
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Pour simplifier, le SIT est une base de données qui regroupe les informations touristiques du territoire dans le but de les rendre accessibles aux différents acteurs du réseau. Au bout du compte, le SIT permet d’avoir une véritable cartographie de son territoire. De façon très concrète, une partie du SIT sert à renseigner le site internet de la destination, notamment les coordonnées des prestataires.
Sauf que, si hier le site de l’OT était le portail d’entrée principal pour rechercher le nom ou l’adresse d’un prestataire, c’est de moins en moins le cas aujourd’hui. L’arrivée d’autres plateformes et d’autres outils ont changé le comportement des utilisateurs et leur manière de s’informer. Le parcours d’achat est devenu multicanal (en plus d’être cross-device). Le site de l’OT n’est de loin plus la vitrine unique de la destination.
D’autres alternatives sont offertes à l’Internaute qui s’inspire avant tout sur les réseaux sociaux, les sites d’avis en ligne ou même les blogs. Google (Google My Business), Facebook ou TripAdvisor se sont imposés comme une référence en matière de recherche d’objets touristiques. A contenu pourtant égal, ces plateformes génèrent plus d’engagement que les OT.
Le référencement sur Google a pris une place considérable. Ceux pour qui le seuil critique de trafic par le référencement naturel a été atteint ne peuvent que constater la chute des statistiques. Résultats : un site de moins en moins consulté qui se déclasse dans le fameux moteur de recherche et qui devient de moins en moins visible. C’est le serpent qui se mord la queue. A moins de payer… Mais quand on est une petite structure, le SEA coûte cher.
Alors que faire ? Fermer son site internet et héberger le contenu ailleurs sur le site d’une destination avec une meilleure visibilité ? Sur Google My Business ou autres ? Peut-être. Dans certains cas, cela fera sens.
Toutefois, fermer son site n’est pas une fatalité ! On peut voir les choses différemment et repenser son contenu ! Tant qu’à investir dans le référencement, autant séduire et conquérir de nouveaux clients. Sauf que, la captation de nouveaux clients ne se fera pas en continuant à mettre autant d’énergie dans le SIT, en s’acharnant à mettre à jour des listes exhaustives d’adresses sur le site. Par contre, elle se fera peut-être en créant et partageant du contenu inspirant.
Parce que c’est bien ce dont ont envie les gens aujourd’hui : qu’on leur raconte des histoires, qu’on leur raconte le territoire.
Vers de nouvelles missions ?
- Stratégie et mise en scène du contenu
Pour augmenter le trafic de leur site, des destinations commencent à transférer leurs énergies ailleurs, en mettant notamment l’emphase sur une stratégie éditoriale et de contenu, qui sert à la fois à alimenter leur site web et leurs réseaux sociaux. Comme en témoigne My Provence, office de tourisme des Bouches-du-Rhône.
L’organisme s’affranchit progressivement du guide et de l’annuaire pour consacrer plus de temps et de visibilité aux contenus éditoriaux que sont les rubriques « circuit », « blog » et « inspiration ». Le but est de raconter des histoires et de valoriser du contenu qui est contextualisé en fonction de l’agenda ou de la saison. Cette démarche oblige toute l’équipe à être réactive.
Source : myprovence.fr
C’est une véritable reformulation des métiers et des missions dans l’office. Plusieurs membres de l’équipe ont suivi une formation pour être au point sur le storytelling. Les équipes investissent le terrain pour réaliser des reportages. Les OT du département sont également sollicités pour faire remonter les bonnes adresses et envoyer leurs meilleurs contenus.
Crédit photos ©Maria Alberola
« Nous sommes une destination hyper touristique. Pourtant on avait atteint un plafond de statistiques du trafic web qui nous paraissait vraiment bas. Mais depuis que nous avons pris cette direction, les statistiques sont reparties à la hausse. Ça n’a rien à voir », confie une collaboratrice de My Provence
La démarche éditoriale est aussi celle engagée par l’OT de Lourdes. Cédric Arnault s’est récemment exprimé sur le blog etourisme.info sur les projets en cours dans l’OT. L’un d’eux consiste à impliquer l’équipe, quel que soit le service, dans la création de contenu photo ou vidéo. Le personnel de l’OT peut, en toute liberté, proposer et créer des articles. L’idée est de donner la parole à tous pour qu’ils puissent raconter, de façon personnelle, leur vision du territoire.
Source : lourdes-infotourisme.com
- Stratégie d’accompagnement et d’initiation aux outils Google et Facebook
Mais si l’annuaire n’apparaît plus sous cette forme sur le site, que fait-on de l’information des prestataires ?
Alors que Google et Facebook sont devenus des outils de recherche indispensables aux visiteurs, il serait peut-être plus efficace que l’OT sensibilise et accompagne les prestataires dans la maîtrise de Google My Business, Facebook Places, TripAdvisor, véritables garants de leur visibilité. Il y a un réel enjeu à faire comprendre aux partenaires l’importance d’une visibilité démultipliée sur ces nouveaux canaux.
Revenons à Lourdes. La destination a été approchée par Google cet été afin de savoir si elle avait un intérêt à travailler avec lui sur Google Map/Street View/My Busines en actualisant les POI du territoire.
« Une opération tout bénéf pour Google qui fait bosser les OT à sa place ! » diront certains. Ils auront raison dans un sens. En même temps, il s’agit aussi d’une opportunité pour l’OT. Il peut travailler avec des caméras 360 degrés, prêtées par Google et il va rencontrer ses partenaires afin de les aider à mettre à jour leur fiche My Business. Une démarche qui lui permet d’assurer sa visibilité sur le plus grand moteur de recherche.
« Nous avons pris le temps de recenser les POI présents et ainsi avoir une cartographie claire de la présence de l’ensemble des prestataires sur l’outil Google My Business. Nous enchaînons donc désormais sur la sensibilisation et l’aide à la prise en main de l’outil Google My Business, une action qui rentre complètement dans notre mission d’animation numérique ! » déclare Cédric Arnault.
Quels enjeux ?
Tout comme il n’est pas nécessaire de fermer son site, il n’est pas nécessaire d’abandonner complètement le SIT. La qualification de l’information touristique est indispensable pour connaître son territoire. Cette information est la matière première de la destination. Elle est notamment utile pour le personnel d’accueil et le renseignement des clients. D’un point de vue stratégique, il faut continuer de collecter cette donnée. La laisser aux seules mains de ces groupes privés semble périlleux. Seulement, la valorisation promotionnelle du SIT, tel qu’il en est fait aujourd’hui sur le site internet, doit probablement être repensée (plutôt pour du monitoring ? de l’observation ?).
Donc, tout ça paraît formidable : un site internet qui devient un blog, un annuaire exhaustif des prestataires de la région qui disparaît (plutôt qui renaît sous une forme nouvelle de blog), une destination formatrice aux plateformes en ligne. Toutefois, malgré une prise de conscience générale des OT présents, ce changement de cap reste difficile à opérationnaliser. Pourquoi ?
Parce qu’une telle stratégie implique que tout le monde ne dispose pas de la même visibilité en même temps sur le site. Parce que le renoncement à l’exhaustivité est politiquent difficile à faire accepter. Parce qu’il faut tout vendre, sans regard sur la performance ou même l’implication ; il faut continuer de plaire à tous: patrons, élus, comité de direction, organe délibérant, prestataires, touristes.
Bjarke Hjorth de Visit Copenhagen disait « Vous ne plairez pas à tout le monde et c’est une bonne chose ».
A force de trop privilégier l’exhaustivité, les gens ont fini par se fier davantage à la subjectivité d’inconnus sur un site d’avis en ligne plutôt qu’à l’avis éclairé d’un expert local.
Alors tranchons, faisons un choix d’offres ! Pourquoi pas ? Les politiques et les prestataires ne comprendraient pas ? Comprendraient-ils mieux la cotisation qu’ils paient ou l’énergie mise à remplir des formulaires pour des rubriques qui ne sont plus vraiment consultées ?
Peut-être qu’ils comprendraient si on leur (ré)expliquait que c’est dans leur intérêt et celui de la destination d’avoir une fiche Google My Business bien renseignée, que leur visibilité sera meilleure que celle que peut leur offrir actuellement le site de l’OT. Que l’OT est là pour les accompagner et analyser (pourquoi pas) avec eux leurs statistiques de GMB.
Une démarche en cohérence avec « l’hospitalité et l’humain »
Finalement,cette démarche va dans une logique plus large « d’hospitalité et d’humain ». Celle pour laquelle tout le monde est prêt à s’engager sur le papier. Alors laissons les équipes de l’OT continuer à réinventer leurs métiers.
Les métiers au sein des OT se sont beaucoup transformés depuis hier. Néanmoins, les missions d’aujourd’hui et de demain doivent déjà presque être ré-imaginées … simplement parce que l’OT doit évoluer avec le comportement et les usages des voyageurs. Aussi, le cadre dans lequel cette mutation doit s’exercer, demande toujours plus de flexibilité et d’agilité.
A lire aussi sur : Comment optimiser votre profil Google My Business ? Les Digivore.ch
*Animation des ateliers
Cédric Chabry : Think My Web
Nicolas Monseigne : Blaye Tourisme
Jean-Luc Boulin : Mission des offices de tourisme de la Nouvelle Aquitaine (Mona)
Paul Fabing : Agence d’Attractivité d’Alsace
Pascale Vinot : Tourisme & Territoires, chef du projet DATAtourisme
Mathieu Bruc : Auvergne-Rhône-Alpes Tourisme et consultant Tourisme Digital©
Sources :
Voir les deux ateliers des #ET13 sur Facebook :
Je ferme son site Internet. 17 octobre 2017.
A-t-on encore besoin des SIT. 18 octobre 2017
François Perroy. «L’Office de Tourisme de Lourdes cultive les apparitions à 360 degrés ». Blog etourime.info, 16 octobre 2017