Destination intelligente : à la portée des territoires ruraux aussi !

Etourisme Destination

Si la question de la destination intelligente est largement abordée sous l’angle de la connectivité, de la mobilité et de l’écologie, elle est aussi inhérente à la notion de gouvernance et d’expérience client. Cela concerne le processus et l’efficacité de la gouvernance ainsi que la récolte et le traitement des données pour aboutir à une amélioration de l’expérience des résidents et des visiteurs. Le tout, avec une vision ! Les territoires ruraux ou périurbains ont, eux aussi, la capacité (et la responsabilité) de rendre leurs destinations « intelligentes ».

Contexte

La 5e rencontre des Francophonies de l’e-tourisme (#fet5) s’est déroulée du 14 au 16 juin à Sherbrooke (Québec), sous le thème « La destination touristique intelligente : besoins, attentes et aspirations des voyageurs ». L’idée : réunir 23 intervenants de la Belgique, de la France, de la Suisse et du Québec pour échanger sur ce que l’on attend de la destination touristique de demain, ladite « Smart destination ». Cet article pose plusieurs réflexions et constats présentés en assemblée publique le 16 juin.

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Travaillons sur le « backstage » de l’intelligence

Les politiques d’écomobilité ou de connectivité, onéreuses dans leur mise en œuvre et dans leur exploitation, intimident parfois les destinations les plus modestes ou les plus petites. Néanmoins, quelle que soit sa taille, la destination peut se concentrer sur d’autres éléments, présentés ci-après, qui participent à son bon fonctionnement, notamment en décloisonnant des projets, en essayant de mieux connaître les clients et en bonifiant leur expérience.

  • Gouvernance et « intelligence » du territoire

Le manque de vision collective les contraintes d’approvisionnement (répondant à des « logiques » déontologiques, administratives ou politiques) et le traitement des projets en silo constituent un frein majeur au développement de synergies entre acteurs.

La collaboration entre les institutions, les milieux associatifs et les entrepreneurs est indispensable, y compris avec les nouveaux acteurs de l’économie collaborative. D’ailleurs, certaines destinations prennent le parti de ces nouveaux agents économiques. En Bretagne, l’Office de Tourisme Communautaire de Lannion-Trégor propose à ses internautes de se rendre sur le réseau social touristique Gimty.com pour découvrir les environs. De son côté, la ville de Montréal a conclu un partenariat gratuit avec l’application Waze, qui cartographie en temps réel l’état du trafic (accidents, ralentissements, travaux, etc.) en fonction des commentaires des automobilistes. Cas plus particulier, le comité organisateur des JO 2016 s’est allié à Airbnb pour assurer l’hébergement des touristes à Rio.

L’intelligence territoriale inclut également une forme de libéralisation de l’information. L’ouverture des données (« Open Data ») d’un territoire stimule l’innovation. Des destinations comme Lisbonne tirent déjà profit de cette initiative qui a permis de mener à terme plusieurs projets d’entreprise. Si l’on en croit les résultats d’un récent sondage effectué par l’Observatoire Valaisan du Tourisme auprès d’une cinquantaine d’organisations touristiques suisses, seuls 18 % d’entre elles mettent leurs données à disposition d’autres entreprises touristiques.

  • Exploitation des données pour mieux connaître son client

Aujourd’hui, difficile de ne pas laisser de traces (données GPS, carte bancaire, carte d’assurance maladie, réseaux sociaux, etc.). Ces traces, c’est ce que l’on appelle dans le jargon le « Big Data ». Pour être récoltées et exploitées, ces données massives nécessitent des investissements conséquents tant dans les outils que dans les ressources. Mais l’utilisation du Big Data est un enjeu majeur pour le tourisme puisqu’elle contribue à mieux comprendre le comportement et les déplacements des visiteurs ainsi qu’à proposer un produit et un service personnalisés qui répondent adéquatement à leurs attentes.

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En Bretagne, le Comité Départemental du Tourisme du Morbihan centralise les commentaires laissés par les visiteurs à propos de 1’200 hôtels et de ses 1'100 campings sur plus de 20 sites d’avis en ligne. En Suisse, le projet Swicico (mené par l’Institut d’informatique de gestion de la HES-SO Valais) a utilisé les technologies du Web sémantique afin d’analyser le réseau social chinois Sina Weibo. Il a permis d’identifier les lieux fréquentés par les clientèles chinoises, les mots-clés associés à la Suisse, ainsi que le niveau de satisfaction relatif aux prestations. Enfin,  en étudiant le comportement d’achat de ses internautes puis en réajustant ses offres promotionnelles, le Point Defiance Zoo & Aquarium (Washington) a augmenté ses ventes en ligne de 771 % en deux ans.

Pour ne pas se perdre face à un tel volume de données, il est indispensable de se poser plusieurs questions d’ordre stratégique et éthico-légal : Que veut-on savoir ? Quelles données exploite-t-on ? A quoi me serviront-elles après ? Est-ce légal ? Est-ce moral ?

  • Choyer son client : lui faire vivre une expérience et l’inciter à la revivre

L’exploitation des données permet de cerner les attentes des clients et la collaboration permet de proposer des services et des produits cohérents. Ces deux dimensions assurent une meilleure expérience au visiteur. Elles constituent un enjeu crucial dans un contexte de compétitivité accrue :

    • Avant : en anticipant les besoins du visiteur ou en confirmant son choix ;
    • Pendant : en lui procurant de la satisfaction ;
    • Après : en le convainquant de revenir. 

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Durant la rencontre des Francophonies de l’e-tourisme, Paul Fabing, directeur du pôle Qualité de l’accueil de l’Agence de l’Attractivité d’Alsace, aime à imaginer un baromètre dynamique qui indiquerait le potentiel ou l’attractivité touristique de la destination. Il s’agirait alors de tenir compte de plusieurs variables (ex. : météo, trafic, événements, etc.) afin de dégager un portrait de la destination à l’instant T. Voici une mise en situation fictive :

Ce 16 juin, à Sherbrooke, il pleut ! Pas de chance, les données météorologiques avaient pourtant promis le soleil et 24 degrés ! Le site Web (ou l’application, ou un panneau d’information aux portes d’entrée du territoire) de l’office de tourisme pourrait donc en informer le visiteur et le conseiller, plutôt que de le laisser nourrir une frustration due à ce mauvais temps : « Compte tenu des conditions météo, le potentiel de Sherbrooke est aujourd’hui de 70 %. Nous vous invitons à visiter le musée (…) ou à pratiquer l’activité de (…) ». Audacieux ? Peut-être, transparent surtout.

Ne nous leurrons pas, il faudra sauter le pas technologique ! 

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En considérant qu’en 2020, 60 à 70 % de la population résidera en ville, les visiteurs de demain seront majoritairement urbains. Ils s’attendront à pouvoir accéder à une quantité d’information, identique à celle dont ils disposent en ville. Il est donc impossible pour les territoires, même ruraux, de faire l’impasse sur l’intégration d’équipements ou de services connectés.

Un prochain article de blog approfondira ce sujet en donnant un aperçu des objets connectés déjà disponibles sur le marché du tourisme ou en phase expérimentale. En attendant, vous pouvez consulter l’article de Frédéric Gonzalo, participant au #fet5: Les objets connectés et vous.

A lire aussi sur la destination intelligente

La destination intelligente comprend des concepts qui dépassent ceux cités dans cet article. « Intelligibilité du territoire », « outils du territoire intelligent » ou encore « innovation » sont aussi des notions qui vous parlent ? Vous pouvez consulter d’autres contenus des #fet5 :

 

Sources:

Francophonies de l’e-tourisme 2016. «La destination touristique intelligente : besoins, attentes et aspirations des voyageurs», Sherbrooke, conférence du 16 juin 2016. Evénement initié par la Chaire de Tourisme Transat ESG-UQAM (Québec) et etourisme.info