Le tourisme de bien-être à la rescousse

La dépression, le deuxième visage de la pandémie

 

La pandémie n’a pas seulement impacté notre économie. Elle a aussi durement touché notre équilibre mental. Insécurité financière, manque de perspectives, manque de sociabilité : cette triade a favorisé l’essor d’une anxiété généralisée. En Suisse, les états dépressifs graves ont été multipliés par 6 entre février 2020 et novembre 2020. Ils n’ont pas faibli depuis et de nouvelles études sont en cours.

Dans le monde, la croissance du taux de prévalence de troubles dépressifs à cru de façon inégale selon les pays, mais ce taux a augmenté dans toutes les régions du globe.

 

Changement de la prévalence de troubles dépressifs majeurs pendant la pandémie de COVID-19, 2020. Source : https://www.thelancet.com

 

Globalement, les femmes et les jeunes ont été sensiblement plus touchés que les hommes. Les responsabilités ménagères, les travaux ménagers et la garde des enfants ont contribué à exposer les femmes plus que les hommes à la dépression. Quant aux jeunes, ils « se sentaient stressés par le fait qu’ils devaient modifier, reporter ou annuler des plans ou des événements importants ». Affronter la peur de l’avenir seul a amplifié les symptômes de la génération COVID. 

 

Prévalence mondiale du trouble dépressif majeur (A) et des troubles anxieux (B) pendant la pandémie de COVID-19, 2020, par âge et sexe. Source: https://www.thelancet.com

 

Un Montréalais sur trois rapportait en février dernier avoir des symptômes compatibles avec un trouble d'anxiété généralisée (TAG) ou un trouble dépressif probable. Source : GETTY IMAGES / FATCAMERA ISTOCK

 

Renouvellement du secteur du bien-être sur fond de pandémie

 

Cette pandémie a créé une urgence accrue pour renforcer les systèmes de santé mentale dans la plupart des pays. Partout à travers le monde, les stratégies gouvernementales d'atténuation promeuvent actuellement le bien-être et ciblent les déterminants de la dépression. Mais l’offre peine à suivre. Les psychothérapeutes sont en effet dépassés par la demande de soins.

Parmi les recommandations gouvernementales pour éviter la descente infernale, « prendre soin de soi » arrive en tête de celles émises par le gouvernement québécois. Il est par exemple précisé qu’il s’agit de :

  • Demeurer attentif à ses émotions et réactions, et se donner la permission de les exprimer par le moyen de l’écriture, de la peinture ou autre.
  • Pratiquer une activité physique qui vous permet d’évacuer votre stress et d’éliminer vos tensions.
  • Adopter de saines habitudes de vie telles qu’une bonne alimentation et des heures de sommeil suffisantes.
  • Limiter les facteurs qui causent du stress.
  • S’accorder de petits plaisirs (par exemple, écouter de la musique, prendre un bain chaud, lire, etc.)

On comprend à la lecture de ces recommandations, l’importance que peuvent revêtir le loisir et les activités de bien-être pour endiguer la dépression. Depuis 2010, la croissance du secteur du bien-être se situe entre 8 % et 12 % par an, selon la société Etudes et Analyses. Mais « au niveau mondial, le chiffre d’affaires du secteur est de 4200 milliards de dollars et il est attendu une hausse de 5 à 6 % pour les cinq prochaines années au niveau mondial, le chiffre d’affaires du secteur est de 4200 milliards de dollars et il est attendu une hausse de 5 à 6 % pour les cinq prochaines années », avançait le site de la société en 2020. Le COVID 19 en est la raison principale.

Avec la pandémie, la notion de bien-être a pris un sens nouveau. Son sens n’est plus limité au bien-être physiologique, diversifiant potentiellement à la fois l’offre et la clientèle.

 

Les dimensions du wellness contemporain. Source:https://globalwellnessinstitute.org/

 

Quand les préoccupations psycho-sanitaires et écologiques boostent le tourisme indigène

Profitant de cet essor, des hôtels s’ouvrent aux thématiques de prévention et d’accompagnement, complémentant les centres de santé spécialisés et adressant la demande croissante d’optimisation de la santé. Cette stratégie peut être très profitable aux hôtels dans la mesure où une proposition « Health & Wellness » est un nouvel USP, susceptible d’améliorer le revenu par nuit (augmenté du prix de la cure), d’induire des séjours plus longs, d’attirer une clientèle plus captive de la restauration et du spa et de générer un meilleur taux de fidélisation. Enfin, les propositions « Health & Wellness » ont l’avantage d’adoucir les conséquences de la crise du tourisme international en adressant un besoin ordinaire qui est aussi celui de la clientèle locale.

La pandémie a donc contribué à visibiliser la fonction nourricière des liens sociaux et ses liens étroits avec la psyché. Les interactions entre stress, immunité et maladies mentales ont été suffisamment confirmées ces derniers mois pour creuser un marché qui luttait encore contre le stigmate de la folie. La dépression collective contemporaine aura sans doute permis d’accélérer la constitution de ce marché touristique. La sociabilité et le self-care sont deux champs de besoins que les acteurs touristiques ne devront donc pas négliger.

 

Photo en titre: mohamed_hassan