Quoi de neuf dans les musées valaisans ? Point de vue de l’Association Valaisanne des Musées.

#Musée

Entretien avec Mélanie Roh, co-présidente de l’Association Valaisanne des Musées et conservatrice au Musée de Bagnes.

Quel est le paysage muséal valaisan ?

Selon une étude publiée en 2020 par le Service de la culture de l’État du Valais, 76 institutions valaisannes correspondent à la définition proposée par le Conseil international des musées (ICOM). Cette analyse met en évidence la centralité du bénévolat pour le fonctionnement des institutions muséales. Elle montre également que peu de musées disposent d’une direction scientifique professionnelle et de personnel répondant aux critères de professionnalisme dans le domaine muséal.

Mélanie Roh classe les musées valaisans en trois catégories. Tout d’abord, les musées locaux, de petite taille, tenus par ces fameux bénévoles et qui disposent d’un budget dérisoire. Il y a ensuite des musées professionnels, encadrés par 1 à 6 employés. Le Musée de Bagnes, le Musée valaisan de la vigne et du vin ou encore le Musée du Lötschental en sont de bons exemples. Enfin, les Musées cantonaux, à Sion, disposent d’une équipe professionnelle et de moyens plus importants que les autres musées.

Comme partout en Suisse, les musées locaux sont apparus avec la période de haute conjoncture économique qui a suivi la fin de la guerre. La plupart de ces musées exposent des objets et des outils d’une société rurale disparue. La nostalgie, camarade… Aujourd’hui, le fonctionnement de ces musées est discuté. Par exemple, que faut-il conserver ? Ne faudrait-il pas trier tous ces objets souvent identiques pour n’en conserver que quelques-uns ? Et pourquoi ne pas s’intéresser à la collecte d’objets contemporains ?

Nuit des musées Valais © Pierre Daendliker

Quelles sont les missions de l’Association Valaisanne des Musées (AVM) ?

L’association apporte notamment son aide aux musées non professionnels. Chaque année, des cours de formation abordant le travail en musée (médiation, conservation, inventaire…) sont proposés aux musées membres. L’association s’occupe également de la base de données numérisées des objets de multiples institutions muséales valaisannes, aussi bien des musées ayant une structure bénévole que professionnelle. À ce jour, 25'000 objets ont été numérisés avec comme objectif de créer une base de données en ligne. Le but de cette numérisation est de renforcer les échanges entre les musées, les scientifiques et les conservateurs. Enfin, l’association est chargée de l’organisation annuelle de l’une des plus grandes manifestations muséales de Suisse : la Nuit des musées. En Valais, la Nuit des musées est organisée à l’échelle du canton, ce qui est une particularité par rapport au reste de la Suisse qui, souvent, organise la Nuit des musées à l’échelle d’une grande ville. La manifestation valaisanne attire environ 10'000 visiteurs. Elle a impliqué 40 musées valaisans en 2022. Ces événements attirent un public plus jeune, plus large et intergénérationnel, sans oublier le public de proximité.

 

L’événementiel, le divertissement semble prendre de l’importance par rapport à la mission traditionnelle de transmission des connaissances. Qu’en pensez-vous ?

Pour nous, les conservateurs, une simple visite guidée avec les habitants est un déjà un événement en soi. L’envie de transmettre des connaissances reste une mission prioritaire. Bien sûr, le musée peut être le réceptacle de concerts et de spectacles. Mais ce public qui est venu écouter un concert va-t-il finalement visiter le musée ? Faut-il que le musée s’intéresse à ce public en quête de divertissement ? Ou faut-il se concentrer sur les « puristes » des musées qui apprécient une visite guidée dans les collections ou une conférence ? Pour Mélanie Roh, il faut trouver un juste équilibre entre médiation culturelle et animations.

Quelles sont les nouvelles tendances auxquelles les musées valaisans tentent de répondre ?

Les expositions temporaires ont pris de l’ampleur. Elles sont essentielles pour attirer et fidéliser un nouveau public, c’est pourquoi elles revêtent une grande importance. Ces dernières années, de plus en plus d’expositions temporaires s’exportent vers d’autres musées, même hors de Suisse. Cette itinérance et ce partage participent au rayonnement des musées qui mutualisent aussi leurs efforts lorsqu’ils créent de nouvelles expositions.

Les expositions «hors les murs » ont aussi la cote et les idées foisonnent. Avec le PALP festival, le Musée d’Art du Valais a prêté des œuvres d’art que l’on pouvait visiter chez les particuliers. L’AVM avait aussi planché sur l’idée d’emmener le musée et ses objets au café, mais le projet est tombé à l’eau, pandémie oblige. Le musée Olsommer a créé une exposition destinée au public scolaire, « l’expo-MOBILE » qui se baladait de classe en classe. Une réflexion est aussi en cours pour approcher le public adolescent dans les cycles d’orientation et dans les Écoles professionnelles par la création d’un dispositif scénographique itinérant. Et pourquoi ne pas se rendre un jour dans un home pour approcher le public âgé qui ne peut plus se rendre au musée ? Nous cherchons à identifier des voies possibles pour pallier un « déficit inclusif » de la part des musées.

© Musée Olsommer

Justement, il y a de plus en plus d’injonctions sociales adressées aux musées : le musée devrait être inclusif, écoresponsable, la cocréation devrait être valorisée, etc. Que pensez-vous de toutes ces attentes sociétales qui se multiplient ?

Ces tendances sont positives. Le musée doit sortir de sa tour d’ivoire pour aller vers ses publics, en particulier vers sa population.

Qu’en est-il des technologies (réalité augmentée, réalité virtuelle) qui gagnent le monde de la culture et du tourisme culturel ?

Les musées valaisans sont de très petites structures et n’ont pas les moyens d’assurer l’achat et les coûts d’exploitation de ce matériel.

Références

Thiévent Romaric, Rota Mathias. Analyse du paysage muséal valaisan. Cahiers de l’Observatoire de la culture – Valais No 6, État du Valais, Service de la culture, 2020.

Association Valaisanne des Musées. Voyage à travers le paysage muséal valaisan, Hier und Jetzt, Faim de siècle, 2021.

 

Photo en titre : © Musée Olsommer